Manchot de Magellan : où voir les plus grandes colonies en Patagonie ?

Faune
Manchot de Magellan : où voir...
Dans les eaux glacées de l’hémisphère sud, une silhouette noire et blanche fend les flots avec une grâce surprenante. Le manchot de Magellan, passager des mers australes, fascine depuis sa découverte par l’explorateur portugais Ferdinand de Magellan. Il est l’une des 18 espèces de manchots connues sur la planète. Véritable sentinelle des côtes sud-américaines, ce prince des eaux subantarctiques révèle l’état de santé de nos écosystèmes marins, témoignant d’un héritage naturel précieux et vivant.

Manchot de Magellan : que faut-il savoir ?

Un manchot qui vole… sous l’eau !

Contrairement au pingouin, qui peut voler et vit exclusivement dans l'hémisphère nord, le manchot de Magellan est un oiseau nageur des régions australes, reconnaissable à son plumage noir et blanc et sa démarche élégante.

Le manchot de Magellan, de son nom scientifique Spheniscus magellanicus, est un oiseau marin appartenant à la famille des Spheniscidae. Il mesure environ 75 centimètres pour un poids moyen de 4 kilogrammes. Son espérance de vie moyenne dans la nature est de 20 à 25 ans, bien que certains individus puissent atteindre 30 ans. Son plumage brun caractéristique présente un motif distinctif en forme de "fer à cheval" sur la poitrine, servant de signature unique à chaque individu. La tête est noire entourée d'une bande blanche, et certaines parties de la tête sont dépourvues de plumes.

Il est important de rappeler que le Spheniscus magellanicus n’est pas un pingouin mais un manchot, et de ce fait, ne sait pas voler. Pourtant, la nature lui a doté d'une adaptation extraordinaire pour la vie marine. Leur corps hydrodynamique, combiné à des ailes transformées en puissantes nageoires, leur permet de "voler" sous l'eau avec une agilité stupéfiante. Il peut plonger jusqu'à 100 mètres de profondeur et nager à une vitesse de 36 km/h. Chaque année, ces manchots migrent sur de longues distances, souvent plus de 4 000 kilomètres, entre leurs sites de reproduction et leurs zones d'alimentation. En fonction des saisons, les colonies suivent les mouvements des bancs de poissons, principalement des anchois et des sardines, mais aussi des céphalopodes et des crustacés.

Un mode de vie en colonie

Le manchot de Magellan vit principalement le long des zones côtières australes du Chili et de l’Argentine. Pendant l’hiver, il migre vers le nord, atteignant le Chili septentrional jusqu'au sud du Brésil. En général, ce sont les adultes qui migrent le plus loin, tandis que les jeunes et les individus non reproducteurs restent à proximité des colonies. Les scientifiques ont constaté que la majorité des arrivées en Uruguay et au Brésil concernent des femelles. Une étude a révélé que celles-ci plongent moins profondément que les mâles, probablement en raison de leur taille plus petite et donc ont besoin de mirgrer davantage au nord pour trouver leur nourriture.

Les colonies se reproduisent le long des côtes patagonnes, des eaux de la Terre de Feu et des îles Malouines, où les individus creusent des terriers ou utilisent les buissons pour nicher. Aujourd’hui, la population en Argentine est estimée à environ 2,4 millions d’individus, tandis que le Chili en compte près d’un million supplémentaire. Ces chiffres mettent en lumière l’importance des colonies patagoniennes pour la survie de l’espèce et la préservation de l’écosystème marin.

Menaces et protection

Menacé par la pollution, la pêche industrielle et les changements climatiques, le manchot de Magellan bénéficie aujourd'hui de mesures de conservation, notamment dans les réserves naturelles, pour protéger ses colonies et ses zones de nidification.

Le réchauffement des océans perturbe profondément l’écosystème dont dépendent les manchots de Magellan. Les changements dans les courants marins et la raréfaction des ressources halieutiques forcent ces oiseaux à parcourir des distances de plus en plus grandes pour se nourrir. Selon une étude publiée dans Marine Ecology Progress Series, certaines colonies ont vu leur population diminuer de 25 % en seulement dix ans. La pollution marine constitue une autre menace majeure. Les déversements d’hydrocarbures, fréquents le long des côtes patagoniennes, affectent gravement les colonies. "Un oiseau mazouté a moins de 50 % de chances de survie, même après réhabilitation", explique Pablo Martinez, responsable du Centre de Sauvetage des Manchots de Punta Tombo.

Sa conservation nécessite une approche globale, mobilisant scientifiques, autorités locales et grand public. Des initiatives comme le Proyecto Pingüino en Argentine montrent qu’il est possible de concilier tourisme durable et protection de l’espèce. Chaque visiteur peut contribuer à leur préservation en respectant les distances d’observation et en soutenant les programmes de conservation.

Le manchot de Magellan : l’emblème de la Patagonie

Cet oiseau marin est souvent perçu comme des symboles de fidélité, une histoire célèbre illustre cette qualité : en 2011, João Pereira de Souza, un retraité brésilien, sauve un manchot de Magellan couvert de pétrole et affaibli. Après plusieurs mois de soins, il l’a relâché dans la nature. Depuis, le petit animal revient chaque année, parcourant plus de 8 000 km pour retrouver son sauveur. Cet événement a même inspiré le film Mon ami le manchot, sorti en août 2024.

La Patagonie, habitat privilégié de l’espèce, accorde une place particulière au Spheniscus magellanicus dans son imaginaire collectif. Les Tehuelches, peuple autochtone de la région, considéraient ces oiseaux comme des messagers entre le monde terrestre et marin. Des récits locaux évoquent les manchots comme des porteurs de bonnes nouvelles ou des présages liés à la mer, un élément crucial pour la pêche et le commerce. Une autre légende d’origine Kawesqar raconte qu’un jeune guerrier, trop curieux des secrets des profondeurs marines, fut transformé en manchot par les esprits de l’océan.

Aux cotés du puma, ce petit nageur noir et blanc est l’un des animaux les plus emblématiques de la Patagonie, attirant chaque année des milliers de visiteurs des deux côtés des Andes. Les excursions incluent souvent des explications sur leur biologie, leurs comportements et les enjeux de leur conservation. Pas étonnant que les boutiques locales recèle de souvenirs artisanaux à l’effigie de ces adorables oiseaux.

Rencontrer le manchot de Magellan

La bonne nouvelle, c’est qu’il est l’une des espèces de manchots les plus accessibles et faciles à observer. Il fait partie de ceux qui ne vivent pas dans le froid polaire, et représente l’une des plus grandes populations dans son habitat naturel. Il est important de connaître les meilleures périodes et les meilleurs sites pour rencontrer ce petit prince des eaux australes.

Quand observer le manchot de Magellan ?

À la péninsule Valdés, les manchots creusent leurs nids dans le sol meuble ou utilisent des buissons pour protéger leurs œufs et leurs petits des prédateurs et des intempéries.

Pour observer ces emblématiques oiseaux marins la meilleure période s'étend d'octobre à mars, correspondant à leur saison de nidification (de septembre à avril). Le cycle annuel de ces oiseaux marins dessine un rythme naturel unique, invitation à la découverte :

  • Fin août à octobre : retour sur les sites de nidification et formation des couples, qui se réunissent et reconstituent leurs liens.
  • Novembre à décembre : Période de ponte et d'incubation. C'est le moment idéal pour découvrir les comportements parentaux attentifs.
  • Janvier à février : éclosion et élevage des poussins. La colonie est alors à son paroxysme d'activité.
  • Mars à avril : apprentissage de la nage pour les jeunes et préparation de leur migration vers le nord.

Les sites à connaître

Les côtes de Patagonie recèlent des sites remarquables pour l'observation des manchots de Magellan.

Punta Tombo, Argentine

La plus grande colonie se trouve à Punta Tombo, en Argentine, où plus d'un million d'individus se rassemblent chaque année entre septembre et avril. Cette réserve naturelle, située à environ 110 kilomètres au sud de Trelew dans la province de Chubut, offre une expérience d'observation unique au monde. Des sentiers balisés permettent aux visiteurs de s'approcher respectueusement des zones de nidification. Le centre d'interprétation local propose des visites guidées enrichissantes qui expliquent le comportement complexe de ces oiseaux marins. Les meilleurs moments d'observation se situent tôt le matin (entre 6h et 8h) lorsque les adultes partent en mer, ou en fin d'après-midi (16h-19h) lors de leur retour spectaculaire.

L'expédition avec Australis à l'île Magdalena offre une immersion inoubliable au cœur d'une immense colonie de manchots de Magellan, où ces oiseaux sociables et curieux évoluent librement dans leur habitat naturel.

Cabo Dos Bahías, Argentine

Plus au sud de Punta Tombo, la réserve naturelle de Cabo Dos Bahías, près de Camarones, accueille une colonie plus modeste mais tout aussi fascinante d'environ 9 000 couples. L'avantage de ce site moins fréquenté est la possibilité de les observer dans un environnement plus serein, particulièrement pendant la période de reproduction entre octobre et mars.

Reserva Provincial Cabo Vírgenes, Argentine

À 140 km de Río Gallegos, ce site est réputé pour héberger la deuxième plus grande colonie de ces oiseaux marins en Argentine, avec près de 250 000 individus. Accessible en trois heures de route sur une piste caillouteuse, il offre une expérience immersive au cœur des paysages côtiers et des plaines sauvages de la Patagonie, où l’on peut aussi croiser guanacos et autres oiseaux marins.

Isla Pingüino, Argentine

À 40 minutes en bateau depuis Puerto Deseado, cette île historique autrefois utilisée par les explorateurs est un refuge pour ces petites créatures marines. Elle abrite également la seule colonie observables de gorfous sauteurs en Patagonie, une rareté pour les passionnés de faune.

Îles Malouines, Argentine

Les manchots y sont omniprésents, notamment sur les côtes occidentales. Certains sites permettent aussi d’observer d’autres espèces, telles que les manchots papous et les gorfous dorés, dans un cadre sauvage et préservé.

Île Martillo, près d’Ushuaïa, Argentine

Proche d’Ushuaïa, cette île marque la limite sud pour observer les colonies de Magellan. On y rencontre également une population de manchots papous.

Île Magdalena, Chili

Au cœur du détroit de Magellan, cette île accueille plus de 60 000 couples reproducteurs. Les excursions depuis Punta Arenas, entre décembre et février, permettent d’assister à la période où les jeunes explorent leur environnement.

Lors de l'observation des manchots, il est essentiel de garder une distance respectueuse pour ne pas perturber leur comportement, notamment pendant la période de nidification ou lorsqu'ils nourrissent leurs petits.

Îles Puñihuil, Chili

Situées au nord-ouest de l’île de Chiloé, ces trois îlots, classés Monument Naturel en 1999, sont parmi les rares lieux où cohabitent manchots de Magellan et manchots de Humboldt. La meilleure période d’observation s’étend de septembre à fin mars.

Conseils pratiques pour une observation responsable

Pour garantir une expérience d'observation optimale tout en préservant le bien-être des manchots, quelques règles essentielles s'imposent :

  1. Maintenir une distance minimale de 3 mètres avec eux, même si ceux-ci s'approchent naturellement des visiteurs.
  2. Éviter les mouvements brusques et les bruits forts qui pourraient stresser les oiseaux
  3. Ne jamais bloquer leur accès à la mer ou leurs chemins habituels.
  4. Privilégier les visites guidées qui garantissent une approche respectueuse et éducative.

Le développement du tourisme d'observation a des implications importantes pour leur conservation. Les revenus générés contribuent à la protection des sites et à la sensibilisation du public, mais l'affluence doit être soigneusement régulée. Des études menées par l'Université de Patagonie montrent que les colonies bien gérées maintiennent des taux de reproduction stables malgré la présence humaine, à condition que les protocoles d'observation soient strictement respectés.

Chloé
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Chloé

Avec une solide expérience dans l'hôtellerie et le tourisme, Chloé apporte une expertise inégalée du Chili.

Depuis près de deux ans chez Korke, elle transforme chaque voyage en une aventure unique grâce à son sens aigu de l'organisation et à ses compétences relationnelles.

Son parcours diversifié, combiné à une approche centrée sur le client, font d'elle une créatrice de voyages sur mesure exceptionnelle, garantissant des expériences inoubliables.