Les premiers peuples en Argentine
L’Argentine était peuplée par de nombreux groupes indigènes avant l’arrivée des colons européens, avec environ 35 ethnies distinctes reconnues aujourd’hui par l’état argentin. Chaque province abritait des communautés aux cultures et aux histoires variées.
Les Guaranis
Les Guaranis, originaires de l'Amazonie, vivent principalement au Paraguay, au sud du Brésil, en Argentine et en Bolivie. Ce grand groupe ethnique, divisé en plusieurs sous-groupes, a migré vers le sud il y a des milliers d'années, s'installant dans le bassin de la Plata. Leur langue, le guarani, parlée par plus de 6 millions de personnes, reste un symbole de résistance culturelle, notamment au Paraguay où elle est reconnue officiellement. Avec l'arrivée des colons européens et des Jésuites, leur mode de vie s'est transformé, passant par une période de missions prospères, suivie de l'exploitation. Aujourd'hui, les Guaranis luttent contre la déforestation, les conflits fonciers et la perte de leurs terres.
Les Charrúas
Peuple indigène du nord-est de l'Argentine et de l'Uruguay, les Charrúas se répartissaient en plusieurs groupes : les Bohanes, établis sur la côte est du río Uruguay, les Guenoas au nord-est et les Minuanes au sud d’Entre Ríos. Leur mode de vie, axé sur la chasse et la cueillette, était semblable à celui des Patagoniens, et ils pratiquaient la chasse d'animaux tels que les ñandous, les cerfs et divers rongeurs. Ils construisaient des habitations simples et légères, faciles à déplacer, souvent en utilisant des matériaux naturels comme des roseaux et des peaux d'animaux. Leur structure sociale était généralement monogame, bien que certains chefs pouvaient pratiquer la polygamie. Les rôles étaient bien définis : les hommes étaient principalement responsables de la chasse et de la fabrication d'outils, tandis que les femmes s'occupaient de la collecte des ressources, de la cuisine et de la confection de vêtements en peaux.
Les Quilmes
Les Quilmes, un clan de l'ethnie diaguita, habitaient les vallées du nord-ouest de l'Argentine au 15e siècle, et parlaient le cacán. Connus pour leur résistance aux Incas et aux Espagnols, ils participèrent aux guerres Calchaquies pour défendre leur territoire. En 1665, les Espagnols envahirent et déportèrent les Quilmes vers la province de Buenos Aires. Au 18e siècle, leur population déclina sous l'effet de la violence, des maladies et du métissage. Aujourd'hui, leurs descendants vivent principalement dans la province de Tucumán. Le site archéologique de la cité des Quilmes est un témoignage important de leur culture et résistance.
Les Diaguitas
Les Diaguitas, un peuple autochtone du nord-est de l’Argentine, tirent leur nom des Incas, qui les désignaient par un terme quechua. Établis entre 900 et 1500 après J.-C. dans les Vallées Calchaquies et le Petit Nord chilien, ils sont connus pour leur expertise en métallurgie et poterie. Malgré leur intégration partielle à l'Empire inca, ils ont résisté à la domination inca et espagnole. Les Diaguitas vivaient dans des fortifications appelées « pukaras » et utilisaient des systèmes d'irrigation pour cultiver maïs, quinoa et courgettes. Leur société se composait de villages autonomes, chacun dirigé par un chef local.
L'influence inca
L'expansion de l'empire Inca, centré au Pérou, a profondément influencé plusieurs peuples indigènes d'Argentine, en particulier dans le nord-ouest du pays. Les Incas y ont introduit leur administration, leur religion et leurs techniques agricoles, comme les terrasses et les systèmes d'irrigation. Le chemin de l'Inca, ou Qhapaq Ñan, traversait les provinces de Tucumán, Jujuy, Salta et Catamarca. Des sites tels que El Aconquija, les ruines de Tastil, Abra Pampa et le Camino a Iruya témoignent encore aujourd'hui de la présence inca dans la région. Cependant, les peuples locaux ont réussi à préserver une grande partie de leur identité culturelle, intégrant certains éléments de la culture inca tout en maintenant leurs propres traditions et particularités.
Les Huarpes
Les Huarpes, qui vivaient dans les régions de Cuyo, notamment dans les actuelles provinces de San Juan et Mendoza, étaient des agriculteurs sédentaires. Ils maîtrisaient l'irrigation, cultivant le maïs, les courges et les haricots dans des environnements arides. Leur organisation sociale était complexe, avec une hiérarchie claire et des villages fortifiés. Ils ont laissé un héritage durable dans les techniques agricoles utilisées encore aujourd'hui dans cette région viticole.
Les Mapuches
Les Mapuches, originaires de la région andine du Chili et de l’Argentine, en particulier en Patagonie des lacs, notamment dans les provinces de Neuquén, Río Negro et Chubut. Ils vivaient pacifiquement avec d'autres ethnies indigènes avant la colonisation. Ce peuple a plusieurs branches comme les Picunches, Pehuenches et Huiliches. En mapudungun, « Mapuche » signifie « gens de la terre », reflet de leur lien étroit avec la nature. Leur mode de vie traditionnel reposait sur l’agriculture, la pêche et l’élevage, perçus comme des activités communautaires. Aujourd'hui, les Mapuches valorisent leur patrimoine culturel à travers des pratiques artistiques, notamment la danse, le textile, l’orfèvrerie et la céramique, et participent activement à la vie urbaine.
Les Selknams
Les Onas, aussi appelés Selk’nam, étaient un peuple nomade originaire de la Terre de Feu, où ils vivaient dans des conditions climatiques extrêmes. Leur mode de vie était axé sur la chasse et la cueillette, se nourrissant de guanacos, oiseaux et rongeurs. Les communautés côtières complétaient leur alimentation avec des fruits de mer et des baleines. Pour se protéger du froid, ils portaient des vêtements en peaux de guanaco. Socialement, les Selk’nam vivaient en familles élargies, réparties sur des territoires bien délimités appelés "haruwenh", qu'ils partageaient et respectaient entre voisins. Leurs outils étaient fabriqués à partir de bois, os et pierre.
Les Haush
Les Haush, connus aussi sous les noms d’Aush ou Manekenk, sont un peuple indigène d’Argentine qui occupait l’est de la Grande Île de Terre de Feu. Considérés comme étant les premiers habitants de l’île, ils ont été poussés vers le sud-est par d'autres groupes. Leur mode de vie nomade était celui de chasseurs-cueilleurs, vivant en petites communautés dans des huttes. Bien que leur culture soit moins riche que celle des Onas, ils pratiquaient la céramique et la vannerie, et se nourrissaient d’un régime varié incluant guanacos et fruits de mer.
Les Yaganes
Les Yagans, peuple maritime de Terre de Feu, ont vécu de manière nomade en naviguant sur les eaux du sud, depuis le Chili jusqu’au Cap Horn et le canal Beagle. Spécialisés dans la pêche et la chasse maritime, ils utilisaient des canoës en écorce pour se déplacer. Ils se protégeaient du froid grâce à des peaux d’animaux marins. Leur organisation reposait sur une structure familiale solidaire, sans chef désigné. Leur langue complexe, riche de milliers de mots, soulignait leur culture sophistiquée, et leurs techniques de chasse et comme de pêche étaient ingénieuses.
Les Kawésqars
Les Kawésqars, également appelés Alakalufs, habitaient les côtes sud du Chili. Bien qu'ils soient principalement présents sur le territoire chilien, les Kawésqars traversaient parfois la frontière argentine, notamment entre le lac Fagnano et la cordillère des Andes fuégienne. Cette présence occasionnelle dans la région était probablement motivée par des échanges commerciaux avec d'autres groupes autochtones tels que les Onas, les Tehuelches et les Yamana. Ils étaient des navigateurs experts, vivant principalement de la pêche et de la chasse d'animaux marins. Leur mode de vie nomade était marqué par des déplacements saisonniers le long des fjords et des canaux, utilisant des kayaks traditionnels en bois pour se déplacer et chasser.
Religion et croyances des peuples originels d'Argentine
La spiritualité des premiers peuples était profondément ancrée dans leur relation avec la nature et leur environnement. Que ce soit dans le nord ou bien le sud, ces différentes communautés partageaient des piliers communs dans leurs croyances, tels que la dualité, les différents cycles de vie, le culte des ancêtres et la connexion avec la nature. Cette relation étroite avec celle-ci guidait non seulement leur vie quotidienne, mais aussi leurs rituels.
Spiritualité Guaranie : croyances et mythologie
La spiritualité du peuple guarani s’appuie sur une mythologie riche qui explique la création du monde et la nature des esprits. Leur dieu principal, Tupá, est le Dieu suprême qui, en collaboration avec la Déesse de la lune Arasy, fonde l’univers et crée les premiers hommes. La mythologie guaranie met également en avant d’autres esprits emblématiques et diverses créatures hybrides, qui sont liés à des aspects de la vie et de l’environnement, qu’ils soient protecteurs ou malveillants. Les Guaranis croyaient aussi en Yvy Maraey, une terre sans mal où les âmes des justes reposent après la mort. Leurs rituels et chants, souvent pratiqués en communauté, avaient pour but d’honorer ces divinités et de préserver l’harmonie entre les hommes et la nature.
Croyances des Quilmes : la cosmovision andine
Les Quilmes s’inscrivaient dans la cosmovision des peuples andins, vénérant la Pachamama, perçue comme la source de toute vie et de fertilité. Leurs croyances étaient profondément ancrées dans la reconnaissance des forces naturelles, honorant le pouvoir du soleil et de la lune ainsi que des phénomènes tels que le tonnerre et la pluie, essentiels à leur agriculture et à leur survie. Ils exprimaient leur dévotion à travers des offrandes et des rituels de gratitude, en honorant diverses divinités comme le serpent bicéphale, le crapaud, le nandou et le jaguar, qui symbolisaient puissance, fertilité et connexion avec la nature. Cette approche spirituelle illustre leur profonde interconnexion avec le monde naturel et leur respect envers ses forces.
Religion Mapuche : "Pewma" et "Ngenechen"
La cosmovision des Mapuches d'Argentine, tout comme celle de leurs cousins au Chili, repose sur le culte des esprits, des ancêtres et des éléments de la nature, où la Pachamama et les ancêtres (Pillán) jouaient un rôle central. Les machis, chamans mapuches, étaient les gardiens de la sagesse spirituelle et servaient de médiateurs entre le monde des hommes et celui des esprits. Ils utilisaient des plantes médicinales et des chants sacrés pour soigner et guider leur communauté. Ils n'érigeaient de temples pour vénérer leurs divinités, mais ils se sont toujours appuyés sur un riche éventail de rituels et de cérémonies.
Spiritualité des peuples de la Terre de Feu : rituels et pratiques chamaniques
Les indigènes de la Terre de Feu, tels que les Yamanas, les Selk'nam, les Haushs et les Kawésqar, avaient une relation profonde avec la nature, vénérant les esprits associés à la faune et à la flore. Bien qu’ils partagent certaines similitudes, chaque groupe avait sa propre vision cosmique et ses rituels, adaptés à son mode de vie et à son environnement. Les Selk'nam, en particulier, se distinguaient par leur croyance selon laquelle chaque plante et animal était lié à un "ciel" spécifique, ce qui reflétait leur structure sociale. Les chamanes, appelés xo'on, occupaient une place centrale dans leur culture, pratiquant des rituels de guérison et entrant en transe pour communiquer avec un esprit nommé waiuwin. Parmi leurs rituels, la cérémonie du Hain, qui marquait l'initiation des jeunes hommes, revêtait une importance particulière, les intégrant pleinement à la communauté.
La colonisation et impact sur les premiers peuples en Argentine
L'arrivée des Européens à partir de 1502 a marqué le début de la colonisation espagnole, entraînant la création de plusieurs villes importantes. Si certains peuples luttèrent, d'autres s'intégrèrent, le tout imprégné par la violence, les guerres et les déplacements forcés.
Dans le bassin de la Plata, l'arrivée des missionnaires jésuites au XVIIe siècle a laissé une empreinte sur différents peuples, dont les Guaranis. Les jésuites établirent des réductions comme San Ignacio Miní, Nuestra Señora de Loreto et Nuestra Señora de Santa Ana, où les indigènes étaient regroupés et christianisés. Bien que ces réductions aient offert une certaine protection contre l'esclavage, les abus des colons et les pillages des bandeirantes, elles provoquèrent aussi une véritable transformation culturelle. Les croyances religieuses et pratiques traditionnelles furent en grande partie remplacées par le catholicisme, entraînant un syncrétisme religieux où des éléments autochtones fusionnèrent avec la foi chrétienne.
Au nord-ouest, les Quilmes résistèrent farouchement aux envahisseurs espagnols pendant plus d'un siècle. Cependant, après leur défaite, ils furent déportés de force vers la région de Buenos Aires, loin de leurs terres ancestrales, ce qui entraîna la dislocation de leur culture et de leur mode de vie. De même, au sud, les Mapuches, les Pampas, les Ranquels et les Tehuelches durent faire face à des campagnes militaires agressives, notamment lors de la « Conquête du Désert » entre 1878 et 1885, menée par le gouvernement argentin pour étendre son contrôle sur les régions indigènes de la Pampa et de la Patagonie. Cette guerre, liée à une politique expansionniste, entraîna la mort de milliers d’autochtones et la confiscation de leurs territoires au sein du pays.
Enfin, les indigènes occupant les terres australes, tels que les Kawesqar, les Selk'nam et les Yagans, furent dévastés par les maladies introduites par les colons, auxquelles ils n'étaient pas immunisés. Leur mode de vie traditionnel fut menacé par la chasse au phoque et l’exploitation des ressources naturelles, les colons recourant souvent à la violence pour s'imposer. Certains membres de ces ethnies furent même envoyés dans des zoos humains dans les capitales européennes, exhibés comme des curiosités, humiliant profondément leurs cultures. Cette brutalité, associée à l'assimilation culturelle, a conduit à l'extinction de ces peuples.
Effets sur la culture et la population actuelle
L’impact de la colonisation sur ces premiers peuples a laissé des traces la population argentine actuelle. Les communautés indigènes continuent de jouer un rôle crucial dans la société et la culture argentine. Les initiatives visant à restaurer les pratiques culturelles sont en plein essor. De nombreux festivals et cérémonies sont organisés pour maintenir vivantes les traditions ancestrales.
Par exemple, le We Tripantu, le Nouvel An Mapuche, est célébré chaque année par les Mapuches en juin. Ce festival marque le renouvellement de la nature et rassemble les communautés autour de rituels de gratitude et de célébration. D’autres événements, tels que le Festival Internacional de la Cultura Indígena en Argentine, mettent en lumière la richesse des cultures indigènes à travers la musique, la danse et l’artisanat. Ceux-ci constituent un vecteur essentiel de la transmission des savoirs ancestraux. Les créations modernes s’inspirent souvent des techniques et des motifs traditionnels des indigènes disparus de la Terre de Feu, tels que les Selk’nam. Ces artisans rendent hommage à ces premiers habitants en intégrant des éléments culturels dans leurs arts, allant des textiles aux masques rituels et aux sculptures. Par ailleurs, la cuisine argentine est profondément influencée par les traditions culinaires ancestrales, avec des plats qui incluent des ingrédients autochtones comme le maïs, les courges et le quinoa.
L’Argentine, malgré l’intégration des droits indigènes dans sa législation, connaît une résistance à leur reconnaissance effective. Les décisions politiques et judiciaires prises par l’État souvent contradictoires exacerbent les tensions, en particulier dans les régions du Sud. Les activités qui visent à extraire des ressources naturelles et le secteur de l’immobilier, perçus comme des menaces par les communautés indigènes, compliquent la coexistence harmonieuse, rendant cet objectif difficile à atteindre à moyen terme.
Passionnée par le Chili depuis longtemps, bien avant même ses premiers pas sur le continent sud-américain, Marilys a fait de cette fascination son métier. Spécialisée en contenus numériques chez Korke, elle puise dans ses découvertes personnelles pour créer des guides pratiques à destination des voyageurs.
Sa polyvalence et son sens du détail, nourris par ses explorations au Chili et en Argentine, se retrouvent dans chaque recommandation. Son instinct de voyageuse et son attention à ce que ces terres australes révèlent au-delà des apparences invitent à les découvrir avec justesse et sensibilité.